jeudi 28 août 2014

Hiva Oa-Tahiti

Nous avons quitté Hiva Oa le mardi 19 août, toujours sans pilote, mon ami Jean-Do, m'ayant fait savoir que la pièce est introuvable sur Tahiti. Il n'est donc pas possible de réparer ici et je serai obligé de la faire venir de France pendant mon séjour à Tahiti. Sans pilote, ce sera plus long et plus fatigant, mais il n'y a que 850 milles à parcourir... Bagatelle !
Hiva Oa fut une cruelle déception. La mer n'y est pas belle... Je savais qu'il n'y a pas de lagons aux Marquises et qu'elles sont copieusement arrosées, mais pas dans de telles proportions. Des pluies fréquentes et soutenues forment des torrents qui déversent dans la mer des quantités d'alluvions. L'eau y est donc marronnasse et très agitée, peu attirante. En contrepartie, les paysages sont grandioses, la végétation luxuriante et les marquisiens charmants et serviables. Sans doute aurais-je plus apprécié cette escale, moins fatigué et avec une météo plus clémente, sans doute aurais-je visité les sites archéologiques magnifiques. Tant pis...
Entre 2 ondées, je suis parvenu, malgré tout, à monter au cimetière où sont enterrés Jacques Brel et Gauguin. Ils ont une belle vue, les saligauds, quand un rayon de soleil apparaît

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C'est donc sans grand regret que nous avons quitté cette île, cap au sud-est vers Tahiti . Passée la première journée, à peu près satisfaisante, le vent a considérablement molli et Bara Gwin, qui pèse lourd, n'aime pas les petits airs...

Vidéo Pétole: http://youtu.be/p2oy1YK_X9Y

Nous nous sommes traînés lamentablement pendant 3 jours avant de retrouver un peu (un peu seulement) de vent, mais du moins soufflait-il de la bonne direction.
En même temps que le retour du vent, nous avons vu arriver un fou à bec bleu, qui a trouvé que les panneaux solaires faisaient une chouette plate-forme d'atterrissage. Mon bateau transformé en porte-avions..

Vidéo Triboulet: http://youtu.be/H7AmvtRX0Fs

Triboulet a passé deux jours avec nous. Il s'envolait régulièrement, pour aller pêcher probablement, puis revenait au bout de quelques heures se reposer et lisser son plumage. Le troisième jour, je l'ai mangé, il laissait trop de guano sur les panneaux solaires.


L'incurvation de la route par le nord correspond au contournement des Tuamotu. Passer au milieu d'une myriade d'atolls et de récifs coralliens qu'on ne voit que quand on a le nez dessus, sans pilote et en solo, donc à la merci d'une panne d'oreiller, m'a semblé quelque peu imprudent. Nous sommes donc passés au nord de cet archipel, rallongeant un peu la route mais gagnant en sécurité.
Et nous voilà à Tahiti. La seule marina de l'île, juste au sud de Papeete, est bondée, j'ai donc dû mouiller à proximité, près du rivage mais assez loin du ponton des annexes.

1er mouillage tahitien
Moi qui rêvais d'une bonne douche et d'un peu de confort, ce n'est pas encore pour tout de suite. Pas de chantier, ni de terre-plain dans cette marina, je ne sais pas encore où je pourrai mettre Bara Gwin au sec, mais chaque chose en son temps, il n'y a pas de problèmes, il n'y a que des solutions. Pour le moment, ça va être repos, sieste, farniente et dodo... Comble de chance, spectacle de danse tahitienne dans un des restos de la marina, ce soir. Je ne vais pas rater l'occasion !
P.S. Merci à Miguelito qui a identifié les poissons pêchés comme de petits thons albacores (Bisous à Sylvie, Michel) 




jeudi 14 août 2014

Panama-Marquises

Samedi 12 juillet.
Enfin ! A l'heure où j'écris ces lignes, je suis dans le Pacifique, tant désiré.
Hier, après avoir récupéré mon passeport, mon visa (il était temps) et ma clearance de sortie, refait le plein de gas-oil et fait mes adieux à Michel et Nathalie, des gens charmants qui m'ont aidé à supporter le stress des préparatifs, j'ai embarqué mes 4« linehandlers »,mercenaires du canal chargés du maniements des aussières au passage des écluses, puis me suis rendu au lieu assigné pour attendre « le trip advisor », du genre des pilotes qu'on trouve dans nos ports.

Vidéo : 1ère écluse de Gatùn:  http://www.youtube.com/watch?v=nl6i4RYjhOo

Nous nous sommes mis à couple avec un autre voilier, allemand, qui lui aussi passe dans le Pacifique. Nous serons disjoints pour la navigation dans le lac de Gatùn, mais passerons toutes les écluses à couple. Après cette première écluse, deux autres lui succèdent, nous faisant monter à 21 mètres, altitude du lac. De l'autre côté, une écluse à Pedro Miguel et deux à Miraflores nous feront descendre au niveau du Pacifique.
La traversée du canal, malgré toute la charge symbolique qu 'elle porte, n'est pas une partie de plaisir. Des heures de moteur, sur 2 jours, avec 5 inconnus à bord qu'il faut nourrir et accommoder du mieux possible pour être sur qu'ils fassent bien le job, le tout par une chaleur moite et étouffante... J'ai connu des nav' plus plaisantes.
Et justement... Alors que les conditions météo des jours précédents, que j'observais quotidiennement, via les fichiers grib, étaient décourageantes, avec des pétoles ou des petits vents contraires, énorme coup de bol, j'ai actuellement 20 nœuds de vent portant et Bara Gwin déboule entre 6 et 7 nœuds vers la sortie du golfe de Panama, là où je redoutais de devoir faire encore des heures de moteur.
Cela ne préjuge en rien du passage du pot-au-noir, mais je peux m'empêcher d'y voir un augure favorable.

Lundi 14 juillet
Ahhhhhh, les petites joies simples ! Retrouver du vent pour faire avancer le bateau et un mince rayon de soleil...
Mais les petites joies simples, faut les mériter : 36 heures à négocier des pétoles, des petits airs venant, alternativement, des 4 points cardinaux et, la nuit dernière, un orage monstrueux qui a duré 4 heures. J'ai eu mon feu d'artifice avant vous ! Les éclairs blanchissaient la nuit sur 360°, accompagnés, par moments, de trombes d'eau qui ont bien rincé le bateau. Je ne sais si j'en ai fini avec le pot-au-noir, mais pour l'instant, je marche plein sud, avant de mettre le cligno à droite, vers les Marquises.

Vendredi 18 juillet
Pas eu trop le temps, ni surtout l'envie, d'écrire les jours précédents, tant c'était déprimant : 3 jours sans un rayon de soleil (« sous un ciel bas et lourd... »), du vent constamment changeant m'obligeant à modifier mes réglages ou à virer de bord, la difficulté à dormir correctement, car il faut manœuvrer la nuit également, m'avaient un peu mis les moral en berne. Point d'orgue hier soir, une tourmente venue d'on ne sait où, avec une soudaineté fulgurante, m'a obligé à barrer 2 heures durant, à poil (car je n'ai pas eu le temps de m'habiller avant de sortir, et après plus question de lâcher le cerceau) sous une pluie diluvienne . Le vent n'était pas très fort, 25 nds, mais variant tellement vite de direction que le pilote ne pouvait suivre. Au moins suis-je tout propre ce matin.
Le tracé de la route suivie cette semaine vous en dira plus que de longs discours.

Slalom pour mes amis suisses
On dit que le chemin le plus court entre 2 points est la ligne droite, ce n'est pas ce chemin que j'emprunte...
Heureusement, ce matin le moral remonte. Beau soleil, vent régulier (pas dans le bon sens, mais ça c'est usuel...), pas un réglage depuis 3 heures, j'ai pu faire toutes les bricoles en retard depuis plusieurs jours. Et je me promets un bon gueuleton avec une salade de chou, du pain frais et une boite de pâté Hénaff (oui, oui, il m'en reste!)

Dimanche 20 juillet.
Ouf ! Quel soulagement ! Plus de 18 heure que je n'ai pas eu à manœuvrer, pas de virement ni d'empannage, pas de réduction de voilure, rien ! Le vent est enfin établi (je sais j'ai déjà dit ça au moins 12 fois...). Certes, nous sommes encore au près, mais à plus de 6 nds en route directe sur les Marquises, plus que 3100 milles à parcourir et, si le vent adonne comme, logiquement, il devrait le faire, nous devrions passer au portant et trouver un peu de confort.
Je n'avais pas pêché, jusqu'à présent, ayant d'autres chats à fouetter. J'ai mouillé mes lignes ce matin, 30 minutes ont suffi pour remonter 2 jolis bestiaux. Si un connaisseur pouvait les identifier...

Vidéo: thons-maquereaux ? :   http://youtu.be/VeQH3Fjiy14

Bilan de cette première semaine :
meilleure journée (la 1ère) : 121 milles
pire journée (17/07) : 61 milles !
Pas très glorieux, tout ça, mais si les conditions actuelles persistent, je passe demain au nord des Galapagos, et franchis l'équateur après-demain.

Mardi 22 juillet
19h42, passage de l'équateur, accompagné de la traditionnelle libation à Neptune, nous voici dans le Pacifique sud.
Bara Gwin doit sentir l'écurie, depuis 2 jours il est fou-furieux, on dirait qu'il lui pousse des nageoires:165 milles hier, 182 aujourd'hui, en route directe sur les Marquises. A ce rythme, nous mettrons beaucoup moins que les 5 semaines escomptées. Mais c'est à la fin du marché qu'on compte les bouses...

Mardi 29 juillet
Ouf ! Un beau lever de soleil, un ciel dégagé et le moral remonte. Depuis une semaine , je n'ai plus de pilote. Après 12 heures de fonctionnement chaotique, il a déclaré forfait. J'ai purgé tout le circuit hydraulique (merci à Victor pour m'avoir, à Las Palmas, enseigné comment faire) mais cela n'a rien changé. Poursuivant mes recherches, je me suis aperçu qu'en tapotant l'électro-pompe du vérin, elle se remet en marche mais s'arrête spontanément au bout de quelque minutes. Je présume donc qu'il faudrait changer les charbons, mais je n'ai pas la pièce à bord.
Je suis donc tenu de barrer le plus souvent possible pour faire avancer le bateau dans le bon sens. Lorsque je ne barre pas, je parviens à trouver un réglage de voilure qui lui permet de faire route, mais cette route s'écarte beaucoup de la route directe. Je dois donc récupérer le cap perdu en barrant. Ajoutez à cela qu'il a fait froid, que j'ai été obligé de sortir les polaires et la veste de quart pour barrer la nuit, vous imaginerez le p'tit coup de blues...
Mais ça va mieux, le vent est plus chaud, le soleil revient et Bara Gwin avance vite. Je suis toujours en avance sur le tableau de marche prévu et tout ça c'est bon pour le moral. Et puis, après tout, surmonter des difficultés, ça fait partie des charmes du voyage.

Jeudi 31 juillet 

la 2ème daurade
Encore une coryphène. Y en a marre du poisson ! Et je n'ai même pas de fromage à raclette pour accompagner...

Vendredi 1er août
Pensée émue pour mon Gauthier qui fête ses 25 ans. Grosses bises, mon fiston.

Vidéo: 1er août:  http://youtu.be/WK-uUFNZKsU

Jeudi 14 août

Cherchez l'erreur (réponse en bas de page)

Nous y sommes. Depuis hier, Bara Gwin est ancré dans la baie d'Atuona, sur l'île d'Hiva Oa, au centre des Marquises. Je suis épuisé (j'ai ptète un peu abusé de mes comprimés pour chiennes incontinentes...) mais euphorique. Lorsque je repense à ce que nous avons fait, malgré les aléas météo, malgré la défaillance du pilote, malgré tous les petits ennuis matériels et pépins de santé dont je vous épargne le détail, je suis fier de mon bateau. Certes, bien d'autres ont fait beaucoup mieux : plus difficile, plus loin, plus vite, plus longtemps, malgré tout, j'ose le dire, je suis également fier de moi. Au programme : repos, grand ménage dans et sur le bateau, lessive puis visite de l'île, très accueillante à première vue.

1er mouillage polynésien


Réponse à l'énigme: tout comme sur mon journal de bord, j'ai zappé la journée du 8 août, si bien qu'en arrivant, j'étais persuadé d'être le jeudi 14 (pardon, Maman, pour l'anticipation...)
P.S. désolé pour tous les messages auxquels je n'ai pas répondu, ou trop brièvement, mais l'accès internet, ici, est plus lent que mon bateau et et plus versatile que mon pilote... :-)
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